Le procès de Georges Tron renvoyé à une date ultérieure
L’Humanité – publié par Marie Barbier le 15 décembre 2017
Au terme d’une journée polluée par des incidents d’audience à répétition, la cour d’assises de Bobigny a finalement décidé le renvoi du procès de Georges Tron et de Brigitte Gruel pour viols en réunion et agressions sexuelles.
En fin d’après-midi, toutes les parties s’étaient accordées pour dire que le calendrier tel qu’il était prévu (des débats jusqu’au 22 décembre), ne pouvait plus être tenu compte-tenu du nombre de témoins (une cinquantaine) restant à être entendus. « Je voudrais qu’il soit dit et retenu ici que si nous renvoyons, c’est uniquement parce que la défense a décidé de polluer les débats », a martelé l’avocat général, Frédéric Bernardo, qui a fustigé la « déloyauté » de la défense.
Ce matin, alors que l’une des plaignantes devait être entendue, la défense a soulevé un incident d’audience en demandant le renvoi pour deux raisons : la diffusion hier soir d’un reportage d’Envoyé spécial sur France 2 consacré à l’affaire « en plein procès » et une « campagne inacceptable », sur twitter et dans la presse, contre le président de la cour d’assises, Régis de Jorna, accusé d’avoir « brutalisée » l’une des plaignantes, Virginie Ettel, lors de sa longue audition devant la cour hier.
En début d’après-midi, la cour d’assises de Bobigny avait refusé cette demande de renvoi, considérant que le reportage d’Envoyé spécial, comme les articles de presse, relevaient de la « liberté fondamentale d’information » et ne remettaient pas en cause l’impartialité et le cours de la justice. C’était sans compter sur la férocité d’Eric Dupond-Moretti, avocat de Georges Tron. « Il faut dire les choses telles qu’elles ont été dites, a t-il lancé à la cour. Nous avons demandé le renvoi parce que vous nous avez dit que vous étiez en difficulté ». Et de raconter que lors d’un entretien confidentiel ce matin entre les avocats et le président de la cour, ce dernier aurait déclaré « Je préférerais que ce soit une femme qui préside ». Pour les parties civiles, Eva Touboul s’indigne de cette atteinte à la « foi du palais », un accord tacite entre magistrats et avocats pour ne pas révéler leurs conversations officieuses. Les avocats hurlent. Les deux plaignantes se tiennent les oreilles et sortent en pleurs de la salle, l’audience est suspendue.
Elle ne reprendra que deux heures plus tard avec la présence de deux bâtonnières qui assurent, se réjouit Eric Dupond-Moretti, sa liberté de parole. Las, tout le monde s’accorde à dire qu’il paraît désormais impossible de finir les débats – qui n’ont pas vraiment commencé – le 22 décembre.
Les parties civiles se disent « consternées » et dénoncent le « terrorisme judiciaire » à l’oeuvre du côté des avocats de Georges Tron et de Brigitte Gruel. « La défense a développé une stratégie de bulldozer pour nous museler », dénonce Me Alexandre-M. Braun. « A partir du moment où la défense a su que cette audience serait publique, elle a tout fait pour qu’elle ne puisse pas se tenir » constate pour sa part Me Vincent Ollivier, avocat de Virginie E. Cette dernière quitte la salle d’audience en larmes. La cour a décidé de « renvoyer à une date ultérieure », sans plus de précision.